lavignasse 2023 - ongoing

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« Nous étions une ferme familiale ».

Ce reportage photographique suit une ferme, en Dordogne, dans un ballet immuable de travail et de tendresse.

Environ une centaine de brebis, des noyers et des vignes. La diversité fait la force ? Pas vraiment.

La PAC recouvre à peine les frais d’exploitation, les noix du Chili cassent le marché, les vignes ont été ravagées par le mildiou l’année dernière. 2023 sera donc une année à perte.

Comment passe-t-on d’une ferme familiale à plusieurs dizaines de personnes, à une exploitation agricole ?

Malgré la richesse de cette terre, les mains sont trop peu nombreuses pour honorer chaque sillon.

C’est là, entre les champs et les ruisseaux, que se tisse l’histoire d’un labeur sans fin, dans le creux de ces mains calleuses réside l’âme d’une lignée.

Périgord Noir, 2023 - en cours

« Aujourd’hui si tu veux être rentable faut faire le même truc et le faire en gros, mais c’est se passer la corde au cou car au moindre problème, gel ou quoi t’es foutu.


[…] Ce qui est compliqué, c’est de passer d’une ferme familiale à une ferme agricole. Avant, je sais pas si tu te rappelles, mais la grand-mère avait son potager, on tuait 2 cochons par an. On était autonome alimentairement déjà. Aujourd’hui, on est 2 pour faire tout ça. C’est 600 à 800 euro par mois de bouffe avec les filles.


[…] Là, en mai juin, chaque jour tu perds un jour de travail. Il faudrait travailler 24h par jour pour faire tout ce qu’il y a à faire. »

« Le COVID, on l’a vu, il y a eu un impact immédiat sur le climat. C’est peut-être la meilleure saison qu’on ait jamais eue. Ben oui, on est resté confiné combien, 3-4 mois ?

On a vu l’impact sur les plantes, la production, avec des températures plus généreuses. Et du calme, des oiseaux, des abeilles, plein de choses. Tu ne peux pas imaginer le nombre de parasites ou de moustiques qui se font écraser sur le pare-brise d’une voiture.

Les moustiques, c’est une chose, mais ça nourrit toujours autre chose, c’est pareil. »

” Je le sais le défaut ici, c’est qu’on est une ferme familiale. […] Après moi, faire un jardin, des patates, tout ça ..non non, je suis tout seul. […]


Mamie, elle allait ranger les sacs dans le hangar quand on avait fini le tabac. Les haricots vert, hein Manu, combien on en a équeuté, de tonnes ? (Rire)


Des tables remplies ! On était combien à équeuter ? 5-6 ? Tous à pester. Je me rappelle une fois, que Guillaume faisait le pitre, avec mamie qui attendait derrière la porte, elle l’a attrapé par les oreilles, aaaaah mais là. ”

« Mais c’est quoi ? Des actions, des crédits fonciers pour le canal de Panama de 1914 ?
Oui, c’est l’arrière-arrière-arrière-grand-père qui a investi dans la construction du canal, mais il a tout perdu.


[…] Donc me dis pas qu’il y a pas du pognon, il y a bien des lingots quelque part ici !!
C’est qui, l’arrière-arrière-arrière-grand-père ?


[…] Oh putain, là c’est des emprunts aux Russes ! Mais quel crétin, il a fait des emprunts aux Russes !!
La plus belle arnaque de l’État soviétique.
Date d’échéance : 1972, ça fait 50 ans que c’est terminé.»

« J’avoue, ce qui nous baise, c’est les noyers.

Là, j’ai 2 ateliers qui me foutent dans la merde. Normalement, quand t’as 3 ateliers, tu peux en avoir un qui est défaillant, les 2 autres compensent, mais donc là, c’est de la perte, sur 2 ans… avant, on était assurés d’avoir un prix de vente, qu’on connaissait, mais là, ils nous l’ont divisé par 2, 2 années d’affilée, avec des frais qui ont euh... pris 30 %, quoi ?

L’essence, les assurances, les engrais ! L’année dernière, j’ai jamais vu ça, les engrais, ils ont doublé, notamment à cause de la guerre en Ukraine. »

En France, le nombre d’agriculteurs a été divisé par quatre au cours des cinquante dernières années.

Cette diminution s’accompagne d’un profond bouleversement dans le modèle des fermes françaises : nous sommes passés de structures familiales, où plusieurs générations cohabitaient, cultivaient un potager, tuaient un cochon par an et travaillaient tous ensemble à la ferme dans une certaine autonomie, à des exploitations plus standardisées, souvent tenues par une seule personne, vieillissante, parfois secondée par un repreneur, souvent le fils.

Lavignasse ne fait pas exception.

Comment chacun vit-il cette transition :

Les parents, encore présents sur la ferme, où ils ont travaillé pendant plus de cinquante ans ?

Arnaud et Aude, sa femme, face à la décision d’abandonner une exploitation transmise et transformée avec tant d’efforts depuis plusieurs générations ?

Et leurs deux filles, qui grandissent au milieu de cette réalité complexe, en héritant peut-être d’un monde en train de disparaître ?